Crise du Covid19 – Vers une signature à distance de documents facilitée dans les opérations de financement en droit français
Les mesures de confinement liées au Covid19 mises en œuvre en France depuis la mi-mars rendent très difficiles, voire impossibles les réunions physiques pour la signature d’opérations de financement soumises au droit français / impliquant des parties françaises.
Pour les actes notariés, les mesures d’urgence édictées par un décret du 3 avril 2020 ont suspendu l’obligation de présence physique et l’ont remplacée par un mécanisme de signature à distance. Cela s’applique à la signature à distance des contrats de prêt et des actes hypothécaires notariés.
Pour les autres actes, les parties doivent recourir aux outils existants.
Cette note résume les règles de signature de la législation française applicables aux opérations de financement, et les mécanismes permettant de faciliter les processus de signature alors que les réunions physiques sont impossibles et où les envois par courrier peuvent être perturbés.
Signature à distance temporaire des actes notariés
En principe, l’exécution des actes notariés nécessite la présence physique des parties ou de leur mandataire devant le notaire, ou une procuration donnée à ce dernier. Le décret du 3 avril 2020 permet, pendant une période allant du 3 avril 2020 jusqu’à un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire (actuellement prévue au 24 mai 2020), de signer électroniquement à distance grâce à un mécanisme certifié (décrit ci-dessous) et par vidéoconférence sécurisée (approuvée par le Conseil supérieur du notariat) permettant de recueillir les consentements des parties. |
Les avis juridiques, les officer’s certificates et les obligations KYC des prêteurs requièrent généralement la remise à la banque ou au signataire d’originaux des documents issue des registres du commerce et des sociétés (extraits Kbis, certificats de non-faillite, etc.). Leur remise est à tout le moins retardée par les mesures de confinement.
La délivrance en ligne des certificats n’est pas perturbée. Toutefois, ces documents ne sont pas considérés comme authentiquement signés.
Dans les circonstances actuelles, il est recommandé aux prêteurs d’abaisser leurs exigences habituelles et d’accepter les certificats électroniques. Il peut également être envisagé de joindre une copie de ces documents à un director’s certificate en vertu duquel ils seront certifiés comme étant conformes et complets (ce qui rend inutile la remise d’un original).
L’article 1367 du Code civil dispose que « La signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. »
- Procès-verbaux des conseils d’administration, des assemblées générales, des programmes d’action et des certificats d’administrateurs/d’actionnaires
Les résolutions du conseil d’administration ou des actionnaires et les procurations confèrent à une partie le pouvoir de signer les documents de transaction en vertu de la loi applicable à la personne morale concernée. Les certificats ont pour but de faire assumer à la partie signataire la responsabilité de l’exactitude des documents, des informations ou des signatures.
Si le signataire n’a pas été habilité à signer (ou a agi au-delà des limites de sa procuration), l’acte sera inopposable à la personne au nom duquel le signataire était censé agir, à moins que la ou les autres parties contractantes ne puissent légitimement croire que le signataire avait un pouvoir suffisant, ou si le pouvoir du signataire a été confirmée sur demande de l’autre partie conformément à l’article 1158 du Code civil.
- Documents de transaction
En droit français, conformément au principe du consensualisme, un accord peut être formé dès lors que les consentements sont échangés entre les parties sans document, sauf disposition contraire prévue par la loi (comme c’est le cas pour la plupart des documents de sûreté). Cependant, la pratique commerciale veut que les documents soient établis par écrit et signés pour des raisons de preuve.
Selon l’article 1375 du Code civil, « l’acte sous signature privée qui constate un contrat synallagmatique ne fait preuve que s’il a été fait en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intérêt distinct, à moins que les parties ne soient convenues de remettre à un tiers l’unique exemplaire dressé. »
Bien qu’en matière commerciale, les preuves puissent être fournies par n’importe quel moyen, il est habituel de remettre un original à chaque partie afin d’éviter toute contestation et de permettre à chacune d’entre elles d’avoir les documents internes complets de leurs transactions.
- Paraphe
Le paraphe de chaque page est une pratique commerciale visant à établir la preuve du consentement de chaque page et à empêcher la substitution de pages.
Ce n’est pas une condition de validité d’un contrat (Cour d’appel de Paris, 4 octobre 1990), mais en cas de litige concernant des stipulations d’un contrat écrites sur une page qui n’aurait pas été paraphée, le juge sera seul compétent pour déterminer si ces stipulations faisaient partie dudit contrat (Cass. 3e civ., 24 mai 1976).
Pour éviter ce paraphage, les parties signataires en droit français acceptent généralement de faire relier leurs documents par une technique de reliure (« Assemblact » par exemple) qui garantit que la substitution, la soustraction ou l’ajout de pages ne peut se faire sans altération évidente.
- Interdiction de signature par « counterpart » – Signature de documents scannés
Le droit français ne reconnaît pas le paraphe / la signature par counterpart d’un contrat régi par le droit français (toutefois, la signature par counterpart par une partie française est possible en France pour les contrats régis par un droit étranger en vertu duquel une telle signature par counterpart est légale).
Dans le cas où un contrat régi par le droit français serait signé par counterpart, il ne serait considéré que comme un commencement de preuve par écrit.
Afin de faire signer leurs documents à distance, les parties peuvent convenir de signer des versions scannées. En pratique, la version d’exécution doit être imprimée par le premier signataire, paraphée sur chaque page, signée dans le bloc de signature correspondant, scannée et envoyée au second signataire qui imprimera le document scanné signé par la première partie et fera de même, etc. Si les signataires ne peuvent pas signer le document le jour même, la date à insérer dans le document doit être la date à laquelle le dernier signataire l’a signé.
- Les documents scannés ne constituent pas une preuve parfaite de la signature
Les versions scannées et la chaîne de courriels pourraient constituer une preuve suffisante du contenu des documents, du consentement des signataires à signer l’accord selon ses termes et de l’identité de ces signataires. Mais la jurisprudence française considère qu’une signature scannée n’est pas suffisante pour prouver l’authenticité du consentement car elle ne permet pas une identification complète du signataire (Cour d’appel de Fort de France, 14 décembre 2012, n°12/00311).
Le Conseil d’État a également jugé que la numérisation d’une signature n’est pas un procédé technique fiable garantissant l’authenticité de cette signature (Conseil d’État, 17 juillet 2013, n°351931).
Par conséquent, s’ils sont signés sur des copies scannées, les originaux des documents devront circuler entre les parties après la signature à des fins de régularisation ou pour pouvoir vérifier que chaque partie recevra un original (il est également rappelé que selon l’article 1375 du Code civil, une partie qui a exécuté un contrat même partiellement ne peut pas invoquer le défaut du nombre approprié d’originaux).
Toutefois, ces signatures scannées peuvent être considérées comme un commencement de preuve par écrit mais doivent être accompagnées de tout autre élément de preuve (échange de correspondance par exemple).
En droit français, la signature électronique est reconnue à condition qu’elle respecte certaines exigences. Elle est définie comme un » procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache » (article 1367 du Code civil).
La signature « au stylo » est ainsi remplacée par un procédé technique dont la fiabilité est présumée, sauf preuve contraire, lorsque l’identité du signataire est assurée et que l’intégrité de l’acte est garantie (article 1367 du Code civil).
La signature électronique consiste en un code électronique qui scelle le document avec un certificat électronique qui est incorporé de manière électronique dans le document. Le certificat contient des informations relatives à l’identité du signataire et à la date, l’heure et au lieu de la signature.
Même si une indication visuelle est apposée sur le document afin de mettre en évidence le fait qu’il a été signé (ce visuel indique également l’identité du signataire et un horodatage), seul le code électroniquement incorporé dans le document attestera de la signature du document par les parties. Ce certificat peut être reconnu par un logiciel approprié (tel que Adobe Acrobat Reader).
Les fournisseurs de services de signature électronique proposent différents niveaux de certification. Il est conseillé aux parties de choisir des services de signature électronique « qualifiés », certifiés aux niveaux européen et français et qui permettent de vérifier l’identité du signataire et de garantir l’intégrité du document. En pratique, les documents sont téléchargés sur une plateforme en ligne avec les noms et les coordonnées de chaque signataire. Les signataires reçoivent ensuite un courrier électronique les invitant à se connecter à la plate-forme où ils peuvent consulter les documents. Afin de les signer électroniquement, ils s’identifient (par exemple en entrant un code reçu sur leur téléphone portable), sélectionnent le(s) document(s) à signer et confirment leur signature électronique par un clic.
Une fois la signature électronique appliquée, les documents sont stockés sous forme électronique et peuvent être consultés et téléchargés par les signataires (conformément à l’article 1375 du Code civil français).
La signature électronique présente des avantages déterminants :
- exécution à distance et par counterpart ;
- pas de nécessité de parapher les pages des contrats ;
- une seule signature électronique par accord ;
- pas de rencontre physique ;
- documents PDF disponibles pour toutes les parties dès qu’ils sont signés (pas d’envois « post-closing » à effectuer) ;
- preuve de signature renforcée ;
- protection contre la fraude.
Toutefois, l’enregistrement obligatoire de certains documents de sûreté auprès du greffe compétent du Tribunal de commerce (ainsi que l’enregistrement auprès du Service des impôts) nécessitera certainement la signature au stylo d’originaux car il n’est pas encore certain que ces organismes publics acceptent en pratique les documents signés par voie électronique.
- S’assurer que les parties ou leurs avocats disposent d’un service de signature électronique et recueillir le consentement de toutes les parties pour cette signature électronique
- Lorsque la signature électronique n’est pas applicable : convenir à l’avance du processus de signature et de collecte des documents
Afin de renforcer la preuve du consentement, les parties sont encouragées à s’entendre sur les preuves acceptables de l’opposabilité avant l’exécution des documents de transaction, conformément à l’article 1356 du Code civil. Toutefois, il convient de garder à l’esprit que le juge français est seul habilité à décider si cet accord préalable peut constituer une preuve suffisante de la signature, du consentement et de l’identification, étant donné que, selon la Cour de cassation, cet accord ne constitue pas une preuve irréfutable (Cass. Com., 6 déc. 2017, n° 16-19615).
- Limiter le nombre de signataires par la signature de pouvoirs et la désignation d’un agent des sûretés
Dans le cas de transactions impliquant plusieurs prêteurs, la désignation d’un agent des sûretés peut être une solution pratique efficace pour réduire le nombre de parties signant les documents de transaction.
Il peut également être envisagé d’accorder une procuration à un signataire qui peut signer physiquement En cas de transaction notariée, une telle procuration peut également être donnée à un notaire (ou à son clerc) pour qu’il signe les actes, ce qui permet la signature de transactions impliquant un prêt hypothécaire.
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