Les sociétés cotées face au coronavirus – 16/03/2020
Bien que le coronavirus relève d’une situation exceptionnelle, rendant à la fois nécessaire et particulièrement délicate la communication financière, rien n’indique à ce stade que les sociétés cotées bénéficieront de dérogations quant au respect de leurs obligations légales ou d’une indulgence quelconque de la part de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). Les émetteurs doivent donc trouver eux-mêmes des solutions pratiques pour parvenir à respecter les dispositions légales et réglementaires qui leur sont applicables, ainsi que pour mettre en œuvre leurs stratégies de développement (par appel au marché, le cas échéant), dans ce contexte difficile.
Les assemblées générales ordinaires annuelles des actionnaires doivent être réunies dans les six mois suivant la clôture de tout exercice social afin de permettre l’approbation des comptes annuels sociaux et/ou consolidés du dernier exercice clos (article L. 225-100 du Code de commerce). Dans la très grande majorité des cas, les sociétés françaises cotées clôturent leur exercice social au 31 décembre chaque année, ce qui implique que l’assemblée générale ordinaire se soit réunie avant le 30 juin de l’année suivante pour approuver les comptes de l’exercice antérieur. Sur ce sujet, les organisations patronales ont récemment fait part au Ministre de l’Economie de différentes propositions concernant les problématiques liées à la tenue des assemblées générales ordinaires annuelles au sein des sociétés cotées et l’idée d’un projet de loi permettant de tenir les assemblées générales à huis clos (c’est-à-dire sans la présence physique des actionnaires), en cas de crise sanitaire, aurait été évoquée, et, selon nos informations, la publication d’une ordonnance autorisant la tenue de telles assemblées générales à huis clos serait imminente. En dépit de la situation sanitaire actuelle liée à la propagation du coronavirus et à l’interdiction des rassemblements impliquant de nombreuses personnes jusqu’à nouvel ordre, ni l’AMF ni le législateur n’envisagent de permettre le report des assemblées générales ordinaires annuelles d’actionnaires au-delà du 30 juin 2020. Un tel report ne serait pas nécessairement bien accueilli par les actionnaires, dans la mesure où cela repousserait d’autant l’approbation des résolutions relatives à l’affectation du résultat des émetteurs, et ainsi toute décision relative à la mise en paiement d’éventuels dividendes. En outre, le report des assemblées générales ordinaires engendrerait des coûts substantiels pour les émetteurs qui, dans leur immense majorité, sont déjà fortement impactés par les répercussions du coronavirus sur leur activité. Surtout, le report des assemblées générales ordinaires annuelles appelées à se tenir d’ici au 30 juin 2020 apparait d’autant moins nécessaire que les actionnaires disposent de moyens alternatifs à une présence physique pour s’exprimer en assemblée générale. Comme l’a rappelé l’AMF dans un communiqué de presse en date du 6 mars 2020, les actionnaires de sociétés cotées ont la faculté de participer aux assemblées générales sans y être physiquement présents, que ce soit en utilisant les formulaires de vote par correspondance ou les formulaires de procuration mis à leur disposition par les émetteurs, ou bien en votant directement sur Internet via une plateforme de vote sécurisée (pour les émetteurs qui permettent cette modalité de vote). Il conviendra toutefois pour les émetteurs de rappeler aux actionnaires les délais applicables s’agissant de la réception des votes à distance, afin d’éviter tout problème de quorum qui impliquerait la convocation d’une deuxième assemblée générale, voire la désignation en justice à la demande de l’émetteur d’un mandataire « ad hoc » (lequel serait chargé de représenter les actionnaires défaillants afin d’atteindre le quorum et ainsi de permettre à l’assemblée de se tenir), dans l’hypothèse où l’approbation de résolutions structurantes pour les émetteurs (par exemple : approbation d’une fusion, approbation d’une augmentation de capital réservée à un nouvel investisseur, etc.) serait à l’ordre du jour. Par ailleurs, l’AMF rappelle dans son communiqué du 6 mars 2020 que tout actionnaire a la faculté de poser des questions écrites sur les sujets relevant de l’assemblée générale (article L. 225-108 du Code de commerce) jusqu’au quatrième jour ouvré précédant l’assemblée générale (article R. 225-84 du Code de commerce). Enfin, dans ce communiqué, l’AMF encourage les émetteurs à prévoir la retransmission en direct de leurs assemblées générales annuelles sur leur site Internet et de communiquer largement à ce sujet. Une des conséquences incidentes du recours massif au vote à distance ou d’une éventuelle tenue des assemblées générales à huis clos (sous réserve d’adoption de l’ordonnance relative à cette faculté exceptionnelle) est la réduction du risque pour les émetteurs d’être confrontés à des incidents de séance ou au dépôt de résolutions nouvelles en cours d’assemblée générale. Il est rappelé que les membres du conseil d’administration ou du conseil de surveillance, en ce compris leur président, n’ont pas nécessairement besoin d’être présents physiquement aux réunions de ces conseils. En effet, sauf disposition contraire des statuts, le règlement intérieur du conseil d’administration ou de surveillance d’un émetteur peut prévoir la faculté pour les membres du conseil d’administration ou de surveillance de prendre part à ses réunions à l’aide de « moyens de visioconférence ou de télécommunication permettant leur identification et garantissant leur participation effective » (article L. 225-37 du Code de commerce). Les membres du conseil d’administration ou de surveillance participant à distance aux réunions du conseil seront comptabilisés dans le quorum des réunions concernées, à l’exception toutefois des réunions relatives à l’arrêté des comptes sociaux et consolidés (lesquelles se tiennent, pour la plupart des émetteurs, en ce moment même) pour lesquelles un membre qui participerait à la réunion à distance serait considéré comme absent, ce qui serait susceptible de soulever des difficultés en termes d’atteinte du quorum. Toutefois, selon nos informations, une ordonnance devrait être publiée de façon imminente afin de permettre de considérer comme présents les membres du conseil d’administration ou de surveillance qui participerait à distance aux réunions relatives à l’arrêté des comptes sociaux et consolidés. Cette ordonnance aurait même un effet rétroactif. – S’agissant de l’information permanente L’AMF a publié un communiqué de presse le 28 février 2020 dans lequel elle rappelle que le règlement Abus de Marché EU 596/2014 du 16 avril 2014 (règlement MAR) impose aux émetteurs de rendre publique, au titre de l’information permanente, toute information privilégiée, c’est-à-dire toute information non publique, intéressant directement ou indirectement un émetteur, à caractère précis et susceptible d’influencer de façon sensible le cours des instruments financiers concernés. L’AMF indique que toute connaissance d’un impact important de l’épidémie sur l’activité, la performance ou les perspectives (par exemple), doit en principe, dès lors que cette information constitue une information privilégiée, être communiquée sans délai au marché. Pour rappel, conformément à la réglementation applicable, les émetteurs peuvent toutefois prendre la responsabilité de différer la publication de cette information privilégiée, à condition que : – la publication immédiate comporte le risque de porter atteinte à leurs intérêts légitimes ; – le report n’engendre aucun risque d’induire le public en erreur ; – l’émetteur concerné soit capable de préserver la confidentialité de l’information jusqu’à sa publication. Dès lors, tout dépendra du décalage potentiel qui pourra être observé entre d’une part les données précises dont dispose l’émetteur en interne et d’autres part les attentes du marché, telles qu’elles se traduisent notamment sur le cours de bourse : laisser se propager des rumeurs excessivement alarmistes, alors que les informations privilégiées sont plus rassurantes, pourrait en effet être considéré comme une tromperie du marché. De manière plus générale, l’AMF recommande aux émetteurs (i) de réévaluer périodiquement l’impact connu et anticipé de l’épidémie sur l’activité et les perspectives quant à son caractère significatif et/ou son montant, (ii) de communiquer sur l’impact de l’épidémie sur leur activité, leur performance ou leurs perspectives lors de la présentation de leurs résultats annuels, et (iii) pour les émetteurs qui communiqueront des perspectives au marché pour 2020 lors de la publication de leurs résultats, d’indiquer les hypothèses retenues eu égard aux impacts potentiels de l’épidémie, même en l’absence d’information plus précise (définitive et chiffrée). – S’agissant de l’information périodique Les sociétés cotées ont l’obligation de publier leur rapport financier annuel dans un délai de quatre mois suivant la clôture de leur exercice social (article L. 451-1-2 du Code monétaire et financier). A ce jour (mais cela peut changer très vite), rien n’indique que la crise sanitaire du coronavirus constituerait un cas de force majeure permettant à un émetteur de ne pas respecter ce délai légal, et ce même si l’émetteur justifiait d’un retard dans la rédaction de son rapport financier annuel dû à des absences continues ou répétées de son personnel (en raison d’une mesure de confinement ou d’une contamination par exemple). L’AMF invite les émetteurs à insérer dans leur rapport financier annuel comprenant leur rapport de gestion, dans la section relative à la description des principaux risques et incertitudes auxquels l’émetteur est confronté, une description de ces risques et incertitudes au vu de l’épidémie. Il est également préconisé par l’AMF d’insérer dans la section relative aux facteurs de risques, contenue dans le document d’enregistrement universel, l’impact de cette épidémie sur l’exposition économique de l’émetteur ainsi que les éventuelles mesures prises par celui-ci. Par ailleurs, il conviendra d’évoquer, dans la section « santé et sécurité au travail » de la déclaration de performance extra-financière (sous réserve que l’émetteur soit concerné par l’obligation de publier cette déclaration en vertu des seuils légaux), les mesures prises par l’émetteur pour garantir la santé et la sécurité de ses salariés vis-à-vis de l’épidémie. Enfin, l’AMF indique que l’épidémie doit être considérée, si nécessaire dans les états financiers au 31 décembre 2019, comme un événement post-clôture nécessitant des informations. Toutefois, aucun ajustement des états financiers au 31 décembre 2019 n’est nécessaire, dans la mesure où seul un évènement lié à des conditions existant à la date de clôture peut entrainer un ajustement des comptes. Or, au 31 décembre 2019, la possibilité de transmission interhumaine du coronavirus n’était pas établie et l’OMS ne signalait qu’un nombre limité de personnes atteintes d’un virus inconnu. Les marchés financiers sont actuellement très impactés par la crise sanitaire provoquée par le coronavirus et il arrive que le cours de l’action de certains émetteurs baisse jusqu’à atteindre une valeur inférieure à la valeur nominale de l’action. Or, le droit français interdit toute émission d’actions à un prix inférieur à leur valeur nominale (article L. 225-128 du Code de commerce), ce qui pourrait en théorie paralyser toute émission d’actions nouvelles par un émetteur pour lequel cette situation perdurerait. Dans un tel cas de figure, les émetteurs disposent toujours de divers dispositifs pour procéder à des levées de fonds. La manière la plus intuitive est de procéder au préalable à une réduction du capital par réduction de la valeur nominale de l’action, ce qui implique cependant que l’émetteur dispose (i) d’une résolution de l’assemblée générale des actionnaires décidant, ou autorisant, une telle réduction de capital, et (ii) de pertes suffisantes en cas de réduction de capital par apurement des pertes. Les émetteurs peuvent également procéder à une augmentation de capital par un mécanisme de libération « mixte » (ce mécanisme étant autorisé par l’article L. 228-7 du Code de commerce), à savoir une libération des nouvelles actions (i) pour partie en espèces (à hauteur du prix de souscription, soit le cours de bourse auquel est appliquée une décote) et (ii) pour partie par voie d’incorporation de réserves, bénéfices ou primes d’émission (à hauteur de la différence entre le prix de souscription et la valeur nominale de l’action), de manière à ce que le prix d’émission des actions nouvelles émises soit bien égal à la valeur nominale des actions nouvelles ainsi émises. Ce dispositif méconnu constitue une véritable alternative à une réduction de capital dont la mise en œuvre n’est pas toujours possible. Par conséquent, il est recommandé aux émetteurs de soumettre au vote de la prochaine assemblée générale des actionnaires, des résolutions donnant tous pouvoirs au conseil d’administration ou au directoire pour réaliser des augmentations de capital permettant une telle libération « mixte » des actions (si une telle délégation n’a pas déjà été accordée dans une résolution en vigueur). Pour plus d’informations concernant ce mécanisme : https://www.jeantet.fr/la-liberation-mixte-des-actions-une-technique-meconnue-permettant-a-une-societe-cotee-de-lever-des-fonds-quand-son-cours-de-bourse-est-inferieur-au-nominal/
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